« Jolis jolis monstres », un roman immersif et sensible sur la scène gay, drag et voguing des années 80
« Jolis jolis monstres », c'est le récit hyper documenté des coulisses de la naissance et de l’explosion des scènes gays, drag et voguing new-yorkaises.
Ce sont deux regards, deux existences qui se croisent et se racontent dans ce roman de Julien Dufresne-Lamy qui nous plonge au cœur du monde des drag-queens et des vogueurs.
D’un côté James, aka Lady Prudence, qui se décrit comme une drag de première classe, autrefois surnommée le Trophée : « le regard de Naomi Campbel, le sourire acier de Grace Jones et la chevelure tempête de Diana Ross », rien que ça !
De l’autre, Victor Santiago, jeune homme qui s’est extirpé d’un gang de South Central Los Angeles et qui se rêve une carrière sur scène. Au fil du roman, James et Victor, racontent à leur façon et selon leur génération, leur rapport à leur corps, leur sexualité, leurs rêves de travestissement et d’incarnation de personnage qui seraient d’une façon ou d’une autre un exutoire salvateur.
Voyage très personnel
Le livre se lit comme un voyage très personnel dans la psyché respective de ces deux personnages mais également dans leurs enfances, leurs histoires, leurs mondes respectifs et dans ce qui les lie de façon intime. On aime particulièrement le récit hyper documenté des coulisses de la naissance et de l’explosion des scènes gays, drag et voguing new-yorkaises.
Lire Jolis jolis monstres, c’est avoir open bar dans les clubs branchés du New-York des années 80 et 90, fréquenter Le Tunnel ou Le Limelight aux côtés de Nina Hagen et RuPaul. C’est se faire tirer le portrait par Nan Goldin avec à chaque bras, un des jeunes artistes émergents que sont encore Keith Harring et Jean-Michel Basquiat. C’est danser sur du disco avec Madonna et Bowie, c’est tomber sous le charme de Tommy Brin d’amour, le « club kid » canadien bourreau des cœurs qui fait de Lady Prudence, un être « tiers drag, tiers kid et tiers folle amoureuse ».
C’est vivre de l’intérieur le tournage du fameux Paris is burning de Jennie Livingston (« un film qui nous ressemble et nous exclut ») et les imbroglios qui ont suivi, ou encore tenter de passer entre les mailles du filet mortel de cette « grande maladie au petit nom ». Du vrai, du faux, mais surtout du cœur.
« Jolis jolis monstres », de Julien Dufresne-Lamy, Editions Belfond, 416 p., 18 €.
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