Lettre ouverte à Anne Hidalgo : « Pourquoi cette “ maison des cultures LGBTQI ” ? Pour répondre à quels besoins ? »

Un article de Têtu daté du mercredi 18 septembre annonce l’ouverture en janvier 2020 d’une « maison des cultures LGBTQI » à Paris, dans le local du 4ème arrondissement, auparavant pressenti pour préfigurer le Centre des Archives LGBTQI. Il est précisé un « lieu de réunion, d’exposition et de stockage ».

Pourquoi cette « maison des cultures LGBTQI » ? Pour répondre à quels besoins ? Comment se fait-il que le Centre LGBTQI+ de Paris IdF soit informé de ce projet par voie de presse ?
Le Centre LGBTQI+ existe depuis 25 ans et représente un lieu essentiel dans la vie de la communauté LGBTQI+ de la région parisienne.

Le Centre regroupant près de 80 associations membres, il accueille et conseille tous les jours un public (22 000 personnes par an) aussi divers que fragilisé. Activistes ou simples usagères-usagers en recherche d’informations y ont trouvé un refuge, des structures, des outils, des espaces d’échange, des moyens de prévention et une écoute pour affronter un monde qui s’évertue encore à nous nier majoritairement.

Pourquoi cette « maison des cultures LGBTQI » ? Pour répondre à quels besoins ? Comment se fait-il que le Centre LGBTQI+ de Paris IdF soit informé de ce projet par voie de presse ?

Notre conception d’un Centre ouvert

Le Centre n’a-t-il donc pas l’expérience de ce qu’est une « maison », ne connaît-il pas bien les besoins de ces publics ? Le développement de nos activités propres et de celles de nos associations membres engendre des besoins croissants en termes d’espace. La Ville de Paris a constaté ces besoins et envisageait d’ailleurs en 2018 de permettre au Centre LGBTQI+ de Paris IdF d’emménager dans de nouveaux locaux qu’elle s’engageait à choisir plus spacieux et situés au centre de Paris (par exemple dans les locaux de la Mairie du 4ème arrondissement). Nous avions expliqué notre conception d’un Centre ouvert, intégré dans ce qui pourrait être un grand espace « mall culturel et social », permettant un partage entre associations (et pas seulement LGBTQI) d’équipements collectifs adaptés (salle de spectacle, espace d’exposition, bureaux, salles de réunions). Mais depuis janvier 2019, nous n’avons plus entendu parler de cette proposition.

Pour ce qui est d’investir dans un nouveau lieu, pourquoi ne pas diriger les fonds et les efforts de la Ville vers un Centre qui est déjà une maison collective depuis 25 ans, désormais à l’étroit, mais prêt à évoluer, à déménager et à rendre Paris enfin fière ?

Un local pas du tout adapté

Têtu annonce que dès janvier 2020 s’ouvrirait une maison des cultures LGBTQI dans un local qui était une salle d’exposition, et qui n’est donc pas du tout adapté à un usage plurifonctionnel (une seule entrée, locaux en vastes plateaux non cloisonnés, essentiellement en sous-sol).
Sont déjà engagés 400 000 Euros de travaux, est prévu un budget de fonctionnement de départ de 100 000 euros, plus un poste de salarié.e.
Le Centre jongle sans budget de fonctionnement (la subvention pérenne de la mairie paye le loyer du local), avec une seule salariée payée chichement grâce à des subventions sur projets. Comment comprendre l’engagement de ces fonds providentiels ?

Pour ce qui est de notre mémoire et de la conservation de nos archives la réponse a déjà été apportée : la grande majorité des associations a adhéré au Collectif Archives LGBTQI et reconnaît sa compétence et la qualité de son projet inspiré des expériences étrangères, notamment américaines mais aussi européennes. Pourtant, le Collectif des Archives a dû renoncer pour l’heure à monter le projet tant attendu, faute d’une réelle confiance et d’un soutien effectif de la Ville. Ceci est d’autant plus urgent que nous avons fêté les 50 ans de Mai 68, ceux de Stonewall, beaucoup de grandes figures de l’histoire de nos luttes sont encore là pour transmettre leur expérience aux jeunes générations. Chaque jour qui passe est une occasion perdue de valoriser ce trésor de connaissances.

Pour ce qui est d’investir dans un nouveau lieu, pourquoi ne pas diriger les fonds et les efforts de la Ville vers un Centre qui est déjà une maison collective depuis 25 ans, désormais à l’étroit, mais prêt à évoluer, à déménager et à rendre Paris enfin fière ?
Respectueusement,

Le Centre LGBTQI+ PARIS IDF
Associations signataires : Inter-LGBT, Collectif Archives LGBTQI, Académie Gay et Lesbienne, ASMF, Association Nationale Transgenre, Association MIF, Paris Gay Village, Equivox Chœur Gay et Lesbien de Paris, Couleurs Gaies, Bi’Cause, Association CDS Laissez-nous-danser, Les Gais Retraités, STRASS, Les ActupienNEs, Groupe Grimpe et Glisse, Afrique Arc-En-Ciel, Plongée Arc En Ciel, ACGLSF, SOS homophobie.

Le titre et les intertitres sont de la rédaction