3 questions à Yanis Khames, organisateur de la première marche des fiertés en banlieues
« Nous nous sommes rendus compte que les LGBTQI+ de banlieues ne se reconnaissent pas forcément dans la marche parisienne. »
« Frères et sœurs, il est temps de nous réunir », annonce le groupe Saint-Denis Ville au Cœur sur Facebook. L’association, créée en 2017, organise le 9 juin la toute première marche des fiertés dédiée aux personnes LGBT+ vivant en banlieue. La marche partira à 14h30 de la place de la Résistance et de la Déportation à Saint-Denis, avant de rejoindre le village associatif à 15h30 devant la basilique de Saint-Denis. Un after est aussi organisé par les Sœurs Malsaines et Les Folles Soirées Dionysiaques. Danse, performance artistique et atelier maquillage sont au programme. L’évènement est financé par Saint-Denis Ville au Cœur, qui a ouvert une cagnotte pour l’occasion.
Yanis Khames, fondateur de Saint-Denis Ville au Cœur, lance un appel à « l’union globale des populations marginalisées » le 9 juin à Saint-Denis.
Komitid : À l’origine, Saint Denis Ville au Coeur promeut la « cohésion sociale » sans s’intéresser spécifiquement aux droits LGBT+. D’où vient cette envie d’organiser une marche des fiertés ?
Yanis Khames : Saint-Denis Ville au Cœur n’a pas de limite dans ses actions. Nous abordons des sujets sociaux et culturels. Pour la marche, des membres de l’association ont ressenti le besoin de l’organiser et toute l’équipe était partante. C’est parce que la marche des fiertés, depuis toujours, est un outil efficace dans la lutte des personnes LGBTQI+. Elle pourra permettre de prouver que les LGBTQI+phobies ne sont pas endogènes à nos quartiers. Nous trouvons aussi qu’il n’y a malheureusement pas encore suffisamment de travail fait à Saint-Denis. La marche servira également à stimuler une dynamique de lutte contre ces discriminations.
Pourquoi avez vous voulu dédier une marche des fiertés aux banlieues, et non pas rejoindre la marche parisienne ?
Même si la marche parisienne a son utilité, la pride des banlieues a d’autres dimensions. Nous nous sommes rendus compte que les LGBTQI+ de banlieues ne se reconnaissent pas forcément dans la marche parisienne. Nous cherchons à créer cet espace de représentation là, qui leur correspond, et qui est différent. Grandir à Paris, ça n’est pas la même chose que grandir en banlieue, nous sommes touché.e.s par différentes discriminations, et nos parcours sont différents.
Organiser cette marche, c’est aussi une façon de combattre les préjugés sur les banlieues, souvent perçues comme des lieux LGBTQI+phobes. Nous voulons améliorer l’image de la ville de Saint-Denis, ainsi que celle des banlieues. Les LGBTQI+phobies ne sont pas, et n’ont jamais été, spécifiques à la banlieue, contrairement à ce qu’on essaye de nous faire croire.
Saint-Denis Ville au Cœur s’oppose aux « formes d’oppressions » quelles qu’elles soient. Mais comment inscrivez-vous la défense des droits LGBT+ dans votre lutte intersectionnelle ?
Nous défendons les droits des personnes LGBTQI+ intersectionnel.le.s, par exemple qui sont racisé.e.s, pauvres, ou discriminé.e.s, ne serait-ce que par le fait qu’ils et elles viennent de quartiers populaires. Nous cherchons à créer un espace pour ces personnes concernées par l’intersectionnalité. En plus de cette marche, nous intervenons aussi dans des maisons de quartiers, auprès de collégiens et de lycéens. Les portes s’ouvrent assez peu et très lentement, mais ça commence.