« L'Homme qui a surpris tout le monde », « Us », « Dernier Amour » : notre critique ciné de la semaine
« Us » est décevant mais la bonne surprise nous vient de Russie avec le nouveau film de Alexei Chupov et Natalia Merkulova.
L’Homme qui a surpris tout le monde
Réalisation : Alexei Chupov et Natalia Merkulova
Drame – Russie – 2018
Distribution : Evgueni Tsyganov (Igor), Natalia Kudryashova (Natalia), Youri Kuznetsov (le grand-père), Alexei Filimonov (Stepka), Pavel Maykov (Zakhar), Igor Savochkin (Fedor) Elena Voronchikhina (la chamane)
Egor, le garde forestier d’un petit village sibérien, découvre qu’il est atteint d’une maladie incurable. La chamane qu’il consulte en désespoir de cause lui conte l’histoire d’un canard qui berna la mort en se déguisant en cane. Il décide de prendre cette légende au pied de la lettre, suscitant l’incompréhension et bientôt la haine des villageois…
Note : 4/5
Alexei Chupov et Natalia Merkulova, couple à la ville et derrière la caméra, sont des magiciens. D’abord en contournant habilement l’interdiction de la « propagande homosexuelle », ils ont miraculeusement rendu possible la sortie de leur film sur les écrans de la Russie poutinienne. Parvenir à parler d’homophobie, et donc d’homosexualité, alors même que le personnage central est un père de famille tout ce qu’il y a d’hétéro, voilà qui n’est pas banal ! Ensuite en produisant une œuvre singulière, aussi profonde dans les thèmes qu’elle aborde que réussie dans son exécution. À la fois touchant et ambiguë, doux et cruel, rude et poétique, cette fable moderne est une excellente surprise venue de la lointaine Sibérie.
Us
Réalisation : Jordan Peele
Thriller horrifique – Etat-Unis – 2019
Distribution : Lupita Nyong’o (Adelaide Wilson/Red), Winston Duke (Gabe Wilson/Abraham), Shahadi Wright Joseph (Zora Wilson/Umbrae),
Evan Alex (Jason Wilson/Pluton), Madison Curry (Adelaide jeune /Red jeune), Elisabeth Moss (Kitty Tyler), Tom Heidecker (Josh Tyler), Cali Sheldon (Becca Tyler), Noelle Sheldon (Lindsey Tyler)
Adelaide et Gabe Wilson partent avec leurs enfants Zora et Jason dans leur maison de vacances. Ce séjour estival prend une tournure terrifiante quand des étrangers habillés en rouge et armés de ciseaux s’introduisent chez eux…
Note : 3,5/5
Après l’excellent Get Out, il semble qu’avec son second film, Jordan Peele se soit quelque peu pris les pieds dans le tapis. Long au démarrage, le scénario ne lésine pas sur l’esbroufe et les effets de manche. À la surprise générale, Us ne fait jamais vraiment peur, tant la tension, pourtant bonne, est neutralisée par des traits d’humour pas toujours bienvenus. Et que dire de la fin qui fourni une explication capillotractée qui ruine le plaisir qu’on prenait jusque là. Finalement, le meilleur de ce cauchemar éveillé un peu décevant reste Lupita Nyong’o, épattante dans un double rôle qui fait rimer dualité avec étrangeté.
Dernier Amour
Réalisation : Benoît Jacquot
Drame – France – 2019
Distribution : Vincent Lindon (Casanova), Stacy Martin (Marianne de Charpillon), Valeria Golino (La Cornelys), Nathan Willcocks (Claremont), Christian Erickson (Lors Pembroke), Julia Roy (Cécile), Anna Cottis (la mère de La Charpillon), Hayley Carmichael (Anna), Nancy Tate (Hortense)
XVIIIe siècle. Casanova arrive à Londres où il croise Marianne de Charpillon, une jeune femme de mauvaise vie, qui va lui faire tourner la tête, jusqu’à lui faire oublier toutes les autres…
Note : 3,5/5
Benoît Jacquot, réalisateur qui s’aventure régulièrement dans le film en costumes, adapte le roman de Giacomo Casanova, Histoire de ma vie. Avec Dernier Amour, il narre un échec amoureux du célèbre coureur de jupons vénitien. Bien que trop âgé pour le rôle, Vincent Lindon fait montre d’une belle justesse. Également irréprochable dans son jeu, la ravissante actrice franco-anglaise Stacy Martin est toutefois désavantagée par sa beauté innocente, qui rend difficile à croire en ce couple improbable. On peut néanmoins apprécier la mise en scène élégante et la reconstitution soignée de ce drame amoureux intimiste très classique, d’une étonnante pudeur.
Également à l’affiche cette semaine
Qui m’aime me suive ! (réalisé par José Alcala) : Simone et Gilbert sont retraité.e.s dans un petit village du Sud de la France. Un jour, ne supportant plus son mauvais caractère, elle le quitte pour Étienne, leur voisin et vieil ami du couple… Un vaudeville rural doux-amer et tendre, plutôt sympathique, à défaut d’être amusant. On apprécie le charme de son triangle amoureux incarné par les sexagénaires Catherine Frot, Daniel Auteuil et Bernard Le Coq.
Sunset (réalisé par Lázló Nemes) : En 1913, Irisz Leiter revient s’installer à Budapest où elle espère obtenir un emploi de modiste dans la chapellerie que ses parents avaient fondé avant d’y décéder dans un incendie quand elle était encore bébé… Le réalisateur du Fils de Saul signe un second drame somptueux, mais un peu trop long et un brin confus.
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