Queers dans un jardin anglais, épisode 1 : Charleston’s garden, la communauté queer de Bloomsbury
Premier épisode d'une série consacrée au patrimoine queer anglais à travers trois jardins… Étape de départ à Charleston’s garden où plane encore le souvenir du groupe de Bloomsbury.
À travers un voyage estival sur les traces d’écrivain.e.s, militant.e.s et artistes queers qui partageaient tout.e.s à leur manière une passion pour les jardins, retour sur trois histoires singulières, trois lieux de vie dont l’originalité témoigne d’un certain usage de la botanique et des fleurs, du rôle joué par le jardin dans leurs modes de vie. Trois exemples qui témoignent aussi du risque de disparition des mémoires queers, souvent minorées dans les mains des histoires officielles.
Première étape dans le Sussex, à la Charleston Farmhouse, où au début du 20ème siècle le groupe de Bloomsbury se réunissait à l'abri des regards…
« Je suis convaincue que si tu obtiens Charleston, tu finiras par y vivre pour toujours. Si tu pouvais t’y installer, tu en ferais quelque chose d’absolument divin » écrit Virginia Woolf en septembre 1916 à sa sœur artiste Vanessa Bell l’enjoignant à emménager avec ses enfants, son amant Duncan Grant et l’amant de son amant David Garnett, à la campagne dans un ancien corps de ferme entouré d’espaces potagers et d’un verger abandonnés.
Un petit matin d’été début août, fraichement débarqué du train, je ne peux que reconnaitre combien son intuition était visionnaire. Aux formes plutôt austères de la bâtisse principale qui n’avait ni eau courante ni électricité lorsque cette petite communauté recomposée s’y installa en 1916, ont succédé aujourd’hui des plantes grimpant sur ses parois, une profusion de fleurs aux couleurs intenses (soucis, digitales, bleuets et campanules peuplent le jardin lorsque je m’y rends), des sculptures disposées à divers endroits du jardin et d’inventifs aménagements intérieurs.
Le jardin principal ceinturé de murs de briques, initialement réduit à ses fonctions potagères fut progressivement transformé en un jardin d’agrément par l’artiste Roger Fry (et amant de Vanessa). Il fut alors cultivé collectivement par ses divers.e.s occupant.e.s tandis que le verger et la création d’un espace potager plus conséquent leur garantissait une production de légumes et de fruits suffisante, particulièrement nécessaire pendant les deux guerres mondiales.
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