« Guy », « Bonhomme » et « Sollers Point - Baltimore » : notre critique ciné de la semaine

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Cette semaine, on découvre trois personnalités particulières : un chanteur de variété des années 70, un traumatisé crânien, et un voyou en quête de rédemption.

Duvauchelle et Girardot dans Bonhomme
A. Girardot et N. Duvauchelle dans « Bonhomme » de M. Vernoux / Les Films du Kiosque

Guy

Réalisation : Alex Lutz
Comédie dramatique – France – 2018
Distribution : Alex Lutz (Guy), Tom Dingler (Gauthier), Pascale Arbillot (Sophie Ravel), Dani (Anne-Marie), Nicole Calfan (Stéphane Madhani), Stephan Wojtowicz (Bernard Kazine), Brigitte Roüan (la mère de Gauthier)

Gauthier découvre après le décès de sa mère que son père biologique serait le chanteur Guy Jamet. Il lui propose de faire un documentaire et de le suivre pendant la tournée de promotion de son dernier disque.

Note : 4/5

Pour sa seconde réalisation, Alex Lutz s’est fait plaisir. Il s’est offert le rôle de sa vie ! Celui de Guy Jamet, un chanteur de variété qui a connu son heure de gloire dans les années 60 et 70. Pour ce faire, il s’est astreint à quatre heures de préparation quotidienne. Et le résultat est au-delà de nos espérances. L’incroyable réalisme du maquillage, mais aussi de la gestuelle et de la voix, nous donne à voir un véritable septuagénaire. Guy est un mélange plus vrai que nature de Dutronc, Herbert Léonard et Clo-clo. Ses tubes ringards calqués sur les succès de l’époque agrémentent ce faux documentaire plus profond qu’il n’y parait. La mélancolie lucide de l’artiste laisse poindre les thèmes du vieillissement, des rapports familiaux, et aussi de l’univers cruel du showbiz. Tout le contraire de Guy qui est un homme attachant, drôle, et… gay friendly !

Bonhomme

Réalisation : Marion Vernoux
Comédie dramatique – France – 2018
Distribution : Nicolas Duvauchelle (Piotr), Ana Girardot (Marilyn), Béatrice Dalle (Annick), François Rollin (le docteur Bensoussan), Jisca Kalvanda (Caro), Sébastien Houbani (Kevin), Marguerite Virgili (Irina)

Piotr et Marylin forment un jeune couple de la banlieue lilloise. Un soir, ils ont un accident de voiture et Piotr se cogne violemment le crâne contre le pare-brise.  À son réveil du coma, il n’est plus du tout le même…

Comment faire face quand son conjoint n’est plus lui-même ? Ce drame social et romantique pose la question sans fard et avec humour. Certains « frontaux », comme les appelle le médecin, sont sans filtres et les problèmes peuvent survenir à tout moment. Piotr est d’un tempérament calme, mais il a des accès d’hypersexualité. C’est la double peine pour Marilyn. Un enfant en haut, un ado en rut en bas. Mais elle l’aime, son homme, et elle va se démener, jusqu’à jongler au travail et avec son cœur.

Note : 4/5

Nicolas Duvauchelle est hallucinant de véracité dans le rôle casse-gueule de cet homme au handicap « invisible ». Sa partenaire Ana Girardot est elle aussi brillante, en femme amoureuse déterminée à sauver son couple, contre vents et marées.
Attention pour les personnes qui s’offusquent à la vue de pénis ou de fesses. Sans fard, on vous dit ! et bien évidemment, ça va de soi, attachez toujours votre ceinture en voiture…

Sollers Point – Baltimore

Réalisation : Matthew Porterfield
Drame – Etats-Unis – 2017
Distribution : McCaul Lombardi (Keith), James Belushi (Carol), Tom Guiry (Aaron), Zazie Beetz (Courtney),
Marin Ireland (Kate), Alyssa Bresnahan (Elaine), Lynn Cohen (Ladybug, la grand-mère), Wass Stevens (Wasp)

Keith, 24 ans, retourne vivre chez son père en résidence surveillée à sa sortie de prison. Il retrouve Sollers Point, son quartier de Baltimore. Il y retrouve aussi de mauvaises fréquentations qu’il a nouées en détention.

Un voyou peut-il être autre chose qu’un voyou ? Keith l’espère, mais sa quête de rédemption sera difficile. Sa volonté de sortir de l’engrenage du trafic de drogue a bien du mal à tenir face aux obstacles, ex co-détenus, suprémacistes blancs, intransigeance de l’administration et relations irrésolues… Jusqu’à ses emportements qui vont lui mettre des bâtons dans les roues. Un portrait peu reluisant d’une certaine Amérique en proie au chômage, à la violence et la ségrégation. Cette même Amérique autrefois prospère, aujourd’hui délaissée par l’industrie qui l’avait nourri.

Note : 3/5

Le charismatique McCaul Lombardi incarne cette vision pessimiste mais réaliste d’une partie de la jeunesse. Il est entouré d’excellents seconds rôles, avec en tête James Belushi et Zazie Beetz (Domino dans Deadpool 2, sorti en mai), qui joue ici son ex petite amie.

Le film a reçu le Prix du jury au Champs Elysées Film Festival 2018.

Également à l’affiche cette semaine :

Il ou elle (réalisé par Anahita Ghazvinizadeh) : J a 14 ans. Il ne se sent pas vraiment garçon, et pas toujours fille. Mais il est temps maintenant de prendre une décision, après deux ans de traitement bloquant la puberté. Visuellement très doux et lumineux, ce drame intimiste ne fait pas de la transidentité de J son sujet central. On en parle, certes, mais la relation de sa sœur avec l’iranien Araz, et leur visite dans sa famille, détourne beaucoup une réflexion qui aurait pu être bien plus forte. (relire également l’entretien accordé par Anahita Ghazvinizadeh à Komitid)

Burning (réalisé par Lee Chang-dong) : Jong-soo retrouve par hasard Haemi, une ancienne camarade d’école, et tombe amoureux d’elle. Elle lui demande de s’occuper de son chat pendant qu’elle part en Afrique. À son retour, elle lui présente Ben, un homme mystérieux… Ce thriller sud-coréen léché traine en longueur (2h28). Une bonne demi-heure en moins aurait pu apporter plus de tension.