Revivez le discours émouvant de Conchita Wurst à la Conférence internationale sur le sida
La gagnante de l'Eurovision 2014 est une fois de plus re-née de ses cendres pour se faire ambassadrice de la lutte contre le VIH, à Amsterdam. Avec douceur, elle a mis le feu aux clichés sur le VIH... et allumé quelques mèches sur les urgences qui persistent pour cette pandémie.
Ce lundi 23 juillet 2018, la 22ème Conférence internationale sur le sida démarrait à Amsterdam. Lors de la traditionnelle soirée d’ouverture, discours et performances se sont succédées, entre célébrités soutenant la cause et activistes de la première heure. Cette année, c’est Conchita Wurst qui a délivré un speech mémorable, elle qui a récemment fait les gros titres pour avoir révélé sa séropositivité pour couper l’herbe sous le pied d’un maître chanteur (son ex…) qui menaçait de l’outer. D’une voix calme chargée d’émotion, elle a abordé l’importance d’abolir la sérophobie, la question de l’accessibilité des traitements et la grande force de toutes les personnes investies dans la lutte contre le VIH-sida.
« En parler, c’était ma plus grande peur. Peur que les gens en parlent dans mon dos si jamais je venais à partager mon secret, car aujourd’hui encore, on parle de cette maladie d’une manière injuste. Il y a une grande stigmatisation autour du VIH parce que les gens ne connaissent pas assez de choses à ce sujet.
Je ne suis qu’une simple personne parmi tant d’autres qui ont été infectées, mais j’ai bien conscience que non : lorsque j’ai partagé cette histoire pour la première fois, elle a été propagée à travers tout le globe. Je n’ai rien reçu d’autre que du soutien et malgré tout j’ai toujours envie de souligner que mon statut sérologique ne me définit pas. C’est juste une fraction de qui je suis.
Aujourd’hui je ne suis pas debout devant vous afin de partager les détails de ma vie privée. Je suis là pour profiter de l’attention dont je bénéficie pour aider à faire lumière sur cette maladie et participer à banaliser cette conversation. Aujourd’hui je me sens plus en forme, plus belle et plus forte que jamais. En un sens, c’est ainsi parce que j’ai affronté ma plus grande peur, que j’ai osé en parler. Ceci est le message que je souhaite faire passer.
« Vous pouvez nous toucher, vous pouvez nous embrasser, vous pouvez nous aimer »
Oui, j’habite dans une région du monde où l’on a accès à ce qu’il se fait de mieux en matière de traitements disponibles. Les gens vivant avec le VIH qui y sont soignés peuvent vivre aussi longtemps que les personnes séronégatives. Vous pouvez nous toucher, vous pouvez nous embrasser, vous pouvez nous aimer, comme vous le feriez avec n’importe qui d’autre.
C’est ce que j’aimerais dont les gens parlent. C’est ce que j’aimerais que les médias disent. Ce que j’aimerais que tout le monde entende et lise, c’est la recherche et les impressionnants résultats obtenus au fil des dernières années. Je veux tout savoir sur les études qui sont menées par d’incroyables personnes, passionnées et talentueuses, scientifiques et technicien.ne.s, qui s’investissent profondément et qui travaillent d’arrache-pied pour mettre fin à cette épidémie. Je parle des gens qui se trouvent dans cette pièce, dans les laboratoires et instituts du monde entier, qui font de leur mieux pour mettre fin à cette maladie pour toute l’humanité.
« Quand est-ce qu’un diagnostic VIH ne sera plus un gros problème ? »
Et en même temps… j’ai envie de savoir pourquoi l’avancement des traitements dont je bénéficie ne sont toujours pas disponibles pour encore tant de personnes infectées. Combien de temps faudra-t-il pour que la recherche et les médicaments soient accessibles à tou.te.s ? Quand mettra-t-on un point final au sida ? Comment faire comprendre à tout le monde qu’il n’y a pas lieu d’avoir peur du VIH, ni des personnes vivant avec le virus ? Comment en tant que société, pouvons-nous rapidement arriver au jour où un diagnostic VIH ne sera plus un gros problème ? Il n’est pas question de minimiser, ne vous méprenez pas, il est question de relayer des faits et non des histoires sensationnelles.
Si l’on veut mettre fin à ce cruel stigma et à la discrimination qui accompagnent spécifiquement cette maladie, nous avons tou.te.s besoin d’entendre, lire et parler du VIH comme de n’importe quelle autre maladie. Et on ne peut pas arrêter d’en parler tant qu’on n’aura pas compris que c’est juste un diagnostic. Tant que les personnes infectées ont accès aux bons traitements, elles peuvent avoir une charge virale indétectable ce qui fait qu’elles ne pourront plus transmettre le virus et continuer leur vie, vivre leurs passions et réaliser leurs rêves.
En parler, c’est ce que j’ai fait. Et je pense que c’est ce que notre société, dans sa globalité, a besoin de faire pour accélérer l’éradication de ce virus. Parce que nous méritons de vivre dans un monde libéré du VIH.
Je pense qu’on peut aisément dire que nous n’en serions pas là aujourd’hui sans cette courageuse icône d’Hollywood, qui a elle aussi foulé cette scène autrefois, en 1992, avec un message similaire de compassion : Dame Elizabeth Taylor. Vous avez déjà entendu ses mots ce soir mais ils valent la peine d’être répétés : “La lutte contre le sida ne doit jamais être une lutte contre les autres. C’est le combat d’êtres humains contre un virus” Oui. Oui. Mille fois oui. Oui. »
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