Canada : mégenrer une personne au travail est une violation des droits humains, d'après un tribunal
Un tribunal en Colombie-Britannique a conclu que le fait de mégenrer une personne dans le cadre du travail constitue une atteinte à ses droits humains.
Mercredi 29 septembre, le tribunal des droits humains de la Colombie-Britannique (ouest du Canada) a rendu un jugement, concluant que mégenrer une personne dans le cadre du travail constitue une violation de ses droits humains. Jessie Nelson, une personne non binaire et genderfluid qui utilise les pronoms they/them, a attaqué en justice son employeur, Buono Osteria, un restaurant italien.
L’employé·e a accusé le gérant du bar, Brian Gobelle, d’utiliser constamment les mauvais pronoms envers iel, et d’utiliser à son égard des termes genrés comme « sweetheart », « honey » et « pinky » (en référence à ses cheveux roses). Jessie Nelson lui a demandé d’arrêter, ce qu’il n’a pas fait. La conversation a alors monté d’un ton entre les deux personnes et l’employé·e a été renvoyé·e quatre jours après. Le gérant a justifié son choix, affirmant que Jessie Nelson y était allé·e « trop fort trop vite » et qu’iel était trop « militant·e ».
Dans sa plainte, l’employé·e a expliqué que le fait d’être discriminé·e sur son lieu de travail en raison de son identité de genre avait exacerbé sa dysphorie de genre. « J’ai vécu toute ma vie en essayant de m’exprimer et de comprendre qui je suis et de trouver une place dans ce monde (…) et c’est une bataille difficile à avoir au quotidien », témoigne-t-iel au procès.
Renvoyé·e en raison de son identité de genre
La juge Devyn Cousineau a estimé que la façon dont Jessie Nelson a été traité·e entre en violation du Code des droits de la personne, un texte de loi en vigueur en Colombie-Britannique. Elle assure que, « comme un nom, les pronoms sont une partie fondamentale de l’identité d’une personne » et que leur utilisation appropriée indique « que nous voyons et respectons une personne pour ce qu’elle est ».
« Surtout pour les personnes trans, non binaires ou autres personnes non cisgenres, l’utilisation des pronoms corrects valide et affirme qu’elles sont une personne tout aussi digne de respect et de dignité », ajoute Devyn Cousineau. « Lorsque les gens utilisent les bons pronoms, ils peuvent se sentir en sécurité et profiter du moment. Lorsque les gens n’utilisent pas les bons pronoms, cette sécurité est compromise et ils sont forcés de répéter au monde : j’existe. »
« Il y a un lien évident entre l’identité de genre de Jessie Nelson et son renvoi. Iel a été renvoyé·e en raison de sa réponse à la discrimination. Iel a été tenu·e à une norme de conduite plus élevée que M. Gobelle, et le contexte discriminatoire du litige a été ignoré ».
Le tribunal a condamné Buono Osteria à 30 000 dollars (environ 20 5000 euros) de dommages-intérêts à Jessie Nelson. L’entreprise doit également mettre en œuvre une politique sur les pronoms, ainsi qu’une formation obligatoire sur la diversité et l’inclusion pour tout le personnel.
Adrienne Smith, l’avocate de Jessie Nelson, a salué la décision du tribunal, qui prouve que « les pronoms corrects pour les personnes trans ne sont pas facultatifs ». « Ils sont le minimum de courtoisie et de respect », explique-t-elle à CityNews. « Ce n’est pas une option de respecter les pronoms que les personnes trans choisissent pour elles-mêmes. C’est une exigence légale d’utiliser les pronoms qu’une personne trans utilise pour elle-même et demande à avoir utilisés sur le lieu de travail ».
À la barre, Jessie Nelson a expliqué son choix d’attaquer en justice ses ex-employeurs. « Je suis ici aujourd’hui pour présenter cela parce qu’il est important pour moi, en tant que personne trans, que mon existence soit respectée. Je suis un être humain, avec un cœur qui bat et un désir d’être vu, valorisé et entendu dans le monde ».
« Et je suis également là pour toutes les autres personnes trans ou queer actuelles et futures travaillant dans un environnement axé sur le service client afin que, espérons-le, cela ne se reproduise plus. Parce que c’est beaucoup. C’est épuisant. Et nous méritons de vivre, d’avoir de la joie et d’être respectés pour qui nous sommes », ajoute-iel.
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