En Israël, l'entrée d'homophobes au Parlement inquiète la communauté LGBTI+
Devant le Parlement israélien, des dizaines de drapeaux arc-en-ciel ont flotté dans le ciel mardi 6 avril : l'investiture de député·es ouvertement homophobes alarme la communauté LGBTI+ dans ce pays pourtant considéré comme pionnier dans la défense des droits de cette communauté.
En Israël, après les législatives du 23 mars, les militant·es LGBTI+ ont particulièrement tiqué sur deux noms : Avi Maoz et Itamar Ben Gvir. Chefs de file de partis d’extrême droite, ces deux hommes politiques ne cachent pas leur aversion pour les membres de la communauté LGBTI+.
Dans un clip de campagne de 2019, le petit parti orthodoxe et nationaliste d’Avi Maoz, Noam, accusait les militant·es LGBTI+, au même titre que d’autres activistes de gauche ou les juif·ves réformé·es, de vouloir « détruire » le peuple juif et les comparait aux nazis. Avec pour slogan « Un peuple normal sur sa terre », Noam affichait clairement son opposition à la reconnaissance des familles homoparentales jugées anormales.
Itamar Ben Gvir, avocat de profession, a lui été l’un des organisateurs de la « beast parade » (le défilé des bêtes) à Jérusalem en 2006, dans laquelle des opposants religieux à la marche des fiertés ont défilé avec des ânes, associant les gays à des animaux.
Alliés au député Betzalel Smotrich, leur formation « Sionisme religieux » a obtenu six sièges au scrutin de mars.
« Il y a des gens à la Knesset aujourd’hui qui pensent que la violence contre les LGBT devrait être institutionnalisée »
« Ce n’est pas légitime dans un pays démocratique et libéral », estime Or Keshet qui milite au sein de la plus importante organisation de défense des droits LGBTI+ en Israël, la Agouda. Cette association a organisé avec d’autres associations de défense des droits humains la manifestation de mardi devant le Parlement, coïncidant avec la prestation de serment des nouveaux députés.
« Il y a des gens à la Knesset aujourd’hui qui pensent que la violence contre les LGBT devrait être institutionnalisée », explique Bracha Barad, une jeune manifestante, responsable d’une association féministe. « Nous ne pouvons pas laisser faire sans protester ».
« Crime »
De fait, les partenaires politiques du Premier ministre sortant Benjamin Netanyahu, désigné mardi pour former le nouveau gouvernement, sont traditionnellement hostiles à la reconnaissance des droits LGBTI+, qu’ils soient ultra-orthodoxes ou d’extrême droite.
Or le soutien des six députés de « Sionisme religieux » à Benjamin Netanyahu lui a permis d’obtenir davantage d’appuis que son rival, le centriste Yaïr Lapid, pour former une nouvelle équipe ministérielle. « On ne veut pas que ces individus fassent partie du gouvernement et qu’ils occupent des postes clé », s’inquiète Or Keshet de l’Aguda.
L’État hébreu est pourtant considéré comme en avance sur les questions LGBTI+ : il reconnaît notamment les mariages pour tou·tes effectués à l’étranger.
Une partie de la communauté LGBTI+ refuse cependant qu’on se serve de sa cause, et répugne à se prêter à ce qu’elle dénonce comme du pinkwashing, qui consisterait à dissimuler sous une couche de rose les réalités israéliennes, à des fins politiques aussi bien que commerciales.
Les militant·es LGBTI+ surveillent aussi avec attention les déclarations du député arabe israélien Mansour Abbas, dont le parti islamiste Raam a créé la surprise aux législatives de mars en obtenant quatre sièges. Il a fait savoir lundi qu’il négocierait avec quiconque serait désigné pour former le gouvernement.
En juillet 2020, Raam avait protesté contre un projet de loi voulant interdire les thérapies de conversion , pratiques visant à changer l’orientation sexuelle des personnes LGBTI+, largement considérées comme violant les droits humains. « Soutenir cette loi revient à diffuser l’obscénité et l’homosexualité parmi les gens et c’est un crime contre la religion et la société », avait indiqué le parti, pour qui l’homosexualité est une déviance immorale.
« On est inquiets d’un scénario selon lequel se profile un gouvernement très conservateur », pris en étau entre tous ces alliés homophobes, souligne Or Keshet.
Avec l’AFP
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