« Les Grosses Têtes » : l'audience à grands coups d'homophobie, de sexisme et de racisme, jusqu'à quand ?
« Mais de quelle liberté parle-t-on à propos des « Grosses Têtes » ? Celle de se moquer, dans l'excès et la vulgarité, et en l'occurence, de toujours les mêmes ? Les femmes, les homos, les trans, les personnes racisées ? »
Il faut reconnaître aux membres de l’AJL* (Association des journalistes LGBTI) un certain courage et une réelle abnégation. Se « taper » l’écoute de l’une des émissions les plus populaires de la radio, Les Grosses Têtes, pendant des heures et des heures, pour les besoins d’une étude inédite, tient de l’exploit. Tant des propos qu’on y entend sont effectivement affligeants.
Rire sur l’actualité et des personnalités est un concept d’émission comme un autre, mais la manière employée par Laurent Ruquier et ses animateur.rice.s est plus que contestable : pour faire rire, on emploie les méthodes d’un autre âge à base de dénigrement et de rabaissement. Surtout, si on en croit l’analyse de l’AJL, les cibles sont toujours pour les mêmes : les femmes, les personnes LGBT+, les personnes racisées…
Une remarque sexiste toutes les 11 minutes
Pendant cinq semaines d’écoute, l’AJL y a relevé de nombreux propos LGBTIphobes, grossophobes, racistes et sexistes, ainsi que des séquences banalisant les violences et crimes sexuels. Sur pas moins de 2 160 minutes d’émission écoutées, l’association a dénombré « 159 propos sexistes, 66 séquences LGBTIphobes, 51 remarques racistes ». L’AJL a sorti le chronomètre : une remarque sexiste a lieu toutes les 11 minutes.
Depuis mardi et la publication de l’étude, les voix pour défendre l’émission n’ont pas manqué de se faire entendre. Sur un ton qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler la volée de bois vert qui a accompagné la sortie du livre d’Alice Coffin cet été. Jean-Marie Bigard, sans surprise, prend la défense des Grosses Têtes. Et affirme, toute honte bue, que cette émission est « le dernier espace de liberté que nous offre encore la radio ».
De quoi parle-t-il ? La liberté de la presse existe en France et la diversité des radios, des opinions et des propos qu’on y entend en est la preuve. Mais de quelle liberté parle Jean-Marie Bigard ? Celle de se moquer, dans l’excès et la vulgarité, et en l’occurence, de toujours les mêmes ? Les femmes, les homos, les trans, les personnes racisées ? Jour après jour, après jour. Toute l’année.
Depuis quelques jours, certains développent l’argument que des blagues ou des termes péjoratifs sur les homos prononcées par des homos, ce ne serait pas pareil. Reprenons : en tant qu’homo, et dans un cercle amical et/ou à des fins militantes, je peux prononcer le mot de « pédé » sans que mes interlocuteurs y voient de l’homophobie. Ça s’appelle le retournement de l’insulte. Mais Laurent Ruquier et les animateurs gays des Grosses Têtes ne parlent pas avec leurs copains, mais bien à des centaines de milliers de personnes ! Ils se retrouvent piégés dans cette mécanique implacable décrite par l’humoriste australienne lesbienne Hannah Gadsby : « Quand cet humour dévalorisant [l’autodérision ] vient de gens maintenus dans les marges, ce n’est pas de l’humilité, mais de l’humiliation. »
Ce qui interroge aussi dans le travail de l’AJL, c’est le silence du CSA depuis des années. Certes, le CSA a annoncé qu’il allait regarder cette étude de près, mais qu’a-t-il fait ? Son inaction est encore plus criante lorsqu’on énumère ses missions, résumée par ces trois mots : Informer, protéger, réguler.
L’enquête de l’AJL a fait du bruit et même la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, interrogée, n’a rien trouvé à redire sur cette émission, à laquelle elle a participé : « Il n’y a pas mort d’homme, il n’y a pas mort de femme ! ». Vous en êtes sûre, Mme la Ministre ? Les mots peuvent blesser, au sens propre comme au figuré, et ils peuvent tuer, au sens propre comme au figuré. Ce n’est pas pour rien que certains propos, le sexisme, l’homophobie, le racisme, ne sont pas des opinions, mais des délits. Dommage qu’il soit nécessaire de le rappeler à une membre du gouvernement.
*Christophe Martet est membre de l’AJL
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misterk
N’IMPORTE QUOI! De chez N’IMPORTE QUOI.
On étouffe avec des associations comme cela, vous condamnez tout et rien. Vous êtes les inquisiteurs et les nouveaux censeurs. De PIRE EN PIRE!