La « partouze » gay qui affaiblit Viktor Orban, figure de proue ultra-conservatrice
Un proche de Viktor Orban surpris dans une soirée libertine gay bruxelloise en plein confinement : la révélation a fait l'effet d'une bombe en Hongrie, où l'opposition et la presse dénoncent l'hypocrisie d'un pouvoir qui cible les personnes LGBT+.
La démission de l’eurodéputé Jozsef Szajer, pilier du parti majoritaire Fidesz — dont Viktor Orban est membre — pourrait en outre fragiliser la position de la Hongrie, au moment où elle est engagée dans un bras de fer avec l’Union européenne sur l’État de droit.
L’intéressé a admis mardi 1er décembre sa participation à une soirée clandestine à Bruxelles, décrite par des médias belges comme une « partouze » à laquelle participaient « vingt-cinq hommes dénudés » et « Covid-free » selon l’organisateur, en violation des règles sanitaires.
« Jozsef Szajer a pris la seule bonne décision » possible en se retirant et en s’excusant, a sobrement réagi la délégation du Fidesz au Parlement européen. Le gouvernement conserve un mutisme gêné tandis que Viktor Orban s’affiche à la messe sur les réseaux sociaux.
« Mensonge »
Tout en se refusant à des jugements de valeur sur ce qui relève de la vie privée, le site internet indépendant Telex note que ce qui pose problème, « c’est le mensonge, la malhonnêteté ». Le Fidesz, rappelle-t-il, « attaque les minorités sexuelles en Hongrie en disant protéger “ la normalité ” ».
« Pendant que [Jozsef Szajer] prenait du bon temps dans un Bruxelles ouvert aux LGBT, il rendait la vie impossible aux LGBT en Hongrie en réécrivant la Constitution », remarquait sur Twitter Szabolcs Panyi, journaliste du média d’investigation Direkt36.
L’épouse du politicien barbu de 59 ans, Tunde Hando, est par ailleurs membre de la Cour constitutionnelle, après avoir dirigé l’Office national judiciaire de 2012 à 2019.
Juriste, Jozsef Szajer aime se présenter comme un des auteurs de la Constitution hongroise adoptée en 2011, dans la foulée du retour au pouvoir du Premier ministre souverainiste Viktor Orban. Or, ce texte comporte une clause définissant « l’institution du mariage comme l’union entre un homme et une femme », le gouvernement voulant défendre les « valeurs chrétiennes ».
Il souhaite maintenant inscrire que « la mère est une femme, le père est un homme », interdire l’adoption aux couples de même sexe et l’inscription du changement de sexe à l’état civil.
Position « affaiblie » pour Orban
La présence confirmée par le parquet de stupéfiants dans son sac à dos et le non-respect des mesures contre la Covid-19 bafouent aussi la morale prônée par Viktor Orban, s’indignait mercredi l’opposition. « Pendant que les politiciens du Fidesz nous donnent des leçons sur le christianisme et la famille, ils mènent une vie totalement différente », a commenté l’ancien Premier ministre de gauche Ferenc Gyurcsany.
L’affaire rappelle celle du maire de Györ (ouest), l’un des poumons économiques de la Hongrie, emporté l’an dernier par un scandale lié à la publication de photos le montrant participant à une orgie sur un yacht. Mais selon Telex, l’impact est là plus retentissant : « cette fois, ce n’est pas un élu local qui a été pris la main dans le sac, mais l’auteur numéro un de la loi fondamentale, le fondateur de Fidesz et le confident de Viktor Orban ».
« La disparition de Jozsef Szajer », bon connaisseur des arcanes du Parlement européen où il siégeait depuis 2004, « va affaiblir la position de Viktor Orban », estime le politologue Zoltan Lakner, responsable de l’hebdomadaire Jelen.
Le Premier ministre a déjà vu partir ces derniers temps deux spécialistes des questions européennes, l’eurodéputé György Schöpflin et son proche conseiller Peter Gottfried. Il ne pourra plus s’appuyer sur ces trois hommes « pour lui relayer les informations » bruxelloises, souligne l’analyste, ce qui pourrait lui manquer au prochain sommet européen.
Les discussions s’annoncent tendues alors que Budapest, associé à Varsovie, a mis son veto au budget de l’UE et au plan de relance qui y est adossé pour dénoncer un nouveau mécanisme permettant de priver de fonds les pays qui ne respecteraient pas l’État de droit.
Autre dossier sensible pour Viktor Orban, Tamas Deutsch, eurodéputé du Fidesz, est dans la ligne de mire après avoir comparé l’attitude de l’Allemand Manfred Weber à celle d’un membre de la Gestapo. Trente parlementaires réclament son exclusion du Parti Populaire européen (PPE, droite). « Qu’est-ce que le #Fidesz doit encore faire pour que vous tous vous rendiez compte qu’il ne peut tout simplement pas faire partie de notre famille », a lancé mercredi sur Twitter le président de cette formation, le Polonais Donald Tusk.
Avec l’AFP
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