Et si la victoire de Pete Buttigieg dans l'Iowa était (quand même) une bonne nouvelle
Au-delà des personnalités et des programmes, c'est bien l'image que peuvent renvoyer les politicien.ne.s LGBT+ qu'il faut questionner.
Ces dernières années, de plus en plus de politicien.ne.s LGBT+ ont investi le champ politique et se sont présenté.e.s pour les plus hautes fonctions électives. Et pas uniquement dans des pays occidentaux dits avancés. Un des exemples les plus frappants est celui de la Première ministre serbe, Ana Brnabić, ouvertement lesbienne et en couple. Cependant, son action sur les questions LGBT+ n’est pas franchement suffisante si l’on en croit les activistes sur place.
Plus près de nous, et il y a quelques années, on se souvient que l’élection de Bertrand Delanoë, premier maire ouvertement gay à Paris, avait été accompagnée de mesures plus fortes en direction des personnes LGBT+. Mais que c’est sa successeure, Anne Hidalgo, hétérosexuelle, qui a fait de la visibilité et de l’inclusivité LGBT un des actes majeurs de sa politique. Non sans être au passage accusée de pinkwashing.
Certes, être LGBT+ ne signifie pas forcément que l’on s’inscrit dans une vision progressiste. Mais au-delà des personnalités et des programmes, c’est bien l’image et l’impact que peuvent renvoyer les politiques LGBT+ qu’il faut questionner.
Lors du premier caucus des primaires démocrates, en Iowa, un état rural du Midwest états-unien, Pete Buttigieg, inconnu du grand public il y a encore un an, est arrivé en tête des votes des délégué.e.s (même si à l’heure où nous écrivons ces lignes, l’incertitude demeure).
Inconnu il y a un an
Lors de l’annonce officielle de sa candidature à la primaire démocrate, en avril 2019, et alors qu’il n’était que le maire d’une ville moyenne de 100 000 habitants non loin de Chicago, cela faisait déjà quatre ans que Pete Buttigieg avait évoqué son homosexualité. Chrétien, il se marie avec son compagnon en 2018, ce qui lui a valu de faire la couverture du magazine Time avec son époux.
Ces derniers jours, sur les réseaux sociaux, je vois pas mal de messages critiquant son positionnement jugé trop peu progressiste. Mais l’essentiel est-il là ? Envisager que le candidat démocrate des États-Unis, qui reste la première puissance du monde et qui influence donc le cours des affaires du monde, puisse être gay, n’est-ce pas déjà le signe que les choses ont changé ? Et surtout, que dit cette visibilité sur l’importance du role model ?
Role model ?
On sait que l’expérience de la découverte de son homosexualité, de sa bisexualité mais aussi de sa transidentité, ne se fait que rarement dans un environnement friendly. Il n’est plus à démontrer l’importance, pour les adolescent.e.s LGBT+ de voir d’autres personnes comme elles.
Prendre la parole en tant que LGBT, être visible au sein de son organisation ou de son entreprise permet de faire reculer les stéréotypes. Se lever et dire : « Voila qui je suis », faire son coming-out (quand et seulement quand on estime que c’est possible et safe) pour aussi aider les autres LGBT+ à s’épanouir, demeure la meilleure façon de faire reculer les discriminations.
Une étude de 2012 sur des ados américain.e.s montrait que, sur le terrain, l’inaccessibilité à des roles models signifie une plus grande détresse psychologique.
Le rôle joué par le président des États-Unis a d’énormes répercussions dans ce pays mais bien au-delà. Depuis son élection à la présidence des États-Unis, Trump a mis en place de nombreuses mesures contre les personnes LGBT+, encourage celles et ceux qui militent contre l’avortement, nomme à tour de bras des juges ultra conservateurs. C’est tout le mouvement conservateur le plus rétrograde qui s’en trouve légitimer aux États-Unis et dans le reste du monde occidental.
La route est encore longue pour les Démocrates américains avant de connaître leur candidat.e à la Maison Blanche (en juillet de cette année). Mais d’ores et déjà, et malgré toutes les réserves que l’on peut avoir sur son programme, le signal envoyé par Pete Buttigieg est plus que significatif.
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