Le parquet ne lie plus le harcèlement au suicide de Lucas
Le parquet ne considère plus le harcèlement scolaire comme la cause du suicide du jeune Lucas survenu en janvier dans les Vosges, ce qui devrait atténuer les éventuelles peines prononcées à l'égard des quatre collégiens mis en cause.
Le parquet ne considère plus le harcèlement scolaire comme la cause du suicide du jeune Lucas survenu en janvier dans les Vosges, ce qui devrait atténuer les éventuelles peines prononcées à l’égard des quatre collégiens mis en cause.
A l’audience, qui s’est tenue à huis clos lundi à Epinal, le tribunal pour enfants était saisi de faits de harcèlement scolaire commis entre septembre 2022 et janvier 2023 et ayant entraîné le suicide du garçon de 13 ans, à l’origine d’une vague d’émotion dans le pays.
Mais « au vu de l’analyse du dossier et de ce qui s’est dit à l’audience, il restait un doute par rapport à la causalité », a indiqué mardi à l’AFP le procureur d’Epinal, Frédéric Nahon, pour justifier le fait que le parquet n’ait pas requis la reconnaissance du harcèlement comme cause du suicide.
« Le tribunal pour enfants reste saisi de la totalité des faits, il appréciera lui-même si effectivement il y a un lien de causalité entre les deux », a ajouté le procureur.
Cette demande, si elle était suivie par les juges, aurait des conséquences importantes sur les peines encourues par les quatre collégiens poursuivis. Dans le code pénal, les peines prévues pour harcèlement scolaire vont jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, contre dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsque le harcèlement est reconnu comme cause du suicide de la victime.
Pour des mineurs, comme c’est le cas dans ce dossier, la peine de prison ne peut dépasser la moitié du maximum prévu pour un adulte, et le plafond de l’amende est fixé à 7 500 euros.
“Présomption de non-discernement”
Ce revirement du parquet est lié à « la date du dernier fait de harcèlement caractérisé, remontant à novembre. Il s’est écoulé plus d’un mois entre le dernier fait caractérisé et le suicide », a justifié Frédéric Nahon.
« Il y a pu y avoir d’autres faits ensuite, mais sans forcément qu’il y ait un lien direct » avec le suicide, a-t-il expliqué.
La période qui sera finalement retenue par les juges pour les faits de harcèlement, entre septembre 2022 et janvier 2023 dans le dossier ou entre septembre 2022 et novembre 2022 dans les réquisitions du parquet, pourrait également avoir des conséquences pour les mineurs poursuivis.
Plusieurs d’entre eux ont eu 13 ans à la fin de l’année 2022, mais n’avaient que 12 ans lors de la commission des premiers faits de harcèlement retenus dans le dossier.
Or la loi établit une présomption de non-discernement selon laquelle, en dessous de 13 ans, un mineur n’a pas la capacité de comprendre les conséquences de ses actes, et ne peut donc pas être reconnu coupable d’une infraction.
Insultes homophobes
Cette présomption peut cependant être contestée selon plusieurs conditions. Si le discernement est effectivement établi, le mineur peut faire l’objet de mesures éducatives, mais pas d’une peine privative de liberté.
Les avocats des quatre adolescents, eux, ont réclamé l’abandon des charges. « On a tous plaidé la relaxe », a expliqué à l’AFP Emmanuelle Larrière, avocate d’un des quatre collégiens. « L’infraction n’est pas constituée, nous n’avons pas besoin de discuter de ses éventuelles conséquences ».
Le jugement a été mis en délibéré au 5 juin.
Lucas, 13 ans, s’était suicidé le 7 janvier, après avoir écrit un mot exprimant sa volonté de mettre fin à ses jours.
Ses proches avaient dénoncé des faits de harcèlement, révélant les moqueries et insultes à caractère homophobe dont l’adolescent s’était dit victime de la part d’autres élèves de son collège, à Golbey (Vosges).
Ce suicide avait suscité une forte émotion. A Epinal début février, plusieurs centaines de personnes avaient participé à une marche blanche en mémoire du jeune garçon.
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