Marie Durand, co-créatrice du collectif Familles : « Il faut parler des familles, au pluriel »
À l'occasion de la deuxième édition du Family Pride Festival, qui se tient à Paris les 20 et 21 mai, la co-créatrice du collectif Famille·s, Marie Durand, s'est entretenue avec Komitid sur la situation des familles queer.
Il y a dix ans le mariage et l’adoption devenaient possibles en France pour les couples de même sexe, marquant un tournant historique pour la communauté LGBTQ+. Depuis dix ans, la question de l’homoparentalité n’a cessé d’être débattue, remise en question et dévoyée publiquement.
C’est pour cela que le collectif Famille·s est né, cherchant à faire connaître les problématiques auxquelles font face ces familles homoparentales marginalisées. En 2022, à Lyon, le collectif a organisé un festival pendant tout un week-end autour des thématiques de la famille queer. Un lieu de partage où les parents et enfants se retrouvent, avec entres autres des ateliers éducatifs, des conférences ainsi que des moments festifs. En 2023, le Family Pride Festival se déplace à Paris pour sa deuxième édition, samedi 20 et dimanche 21 mai à la Cité Fertile de Pantin !
Komitid a pu discuter avec Marie Durand, initiatrice et co-fondatrice du collectif.
Komitid : Qu’est-ce que le Family Pride Festival ?
Marie Durand : Faire un festival était un des projets qu’on visait dès la création du collectif Famille·s. L’idée de ce collectif a émergé en 2020 avec l’envie de connecter nos familles, entre parents et enfants, de faire en sorte que tout le monde puisse se rencontrer. On voulait aussi sensibiliser les alliés, les enseignants, les psychologues, et toutes ces personnes qui sont à côté de nous au quotidien. Forcément, ce festival faisait partie de nos intentions premières : un lieu où on pourrait se réunir, ensemble, dans une atmosphère réflexive, conviviale et festive avec plusieurs ateliers. On voulait vraiment quelque chose qui connecte nos familles mais qui soit ouvert à tous et toutes. L’année dernière à Lyon, on a pu réunir à peu près 1000 personnes autour de conférences, d’ateliers ou de DJ sets. Pour cette nouvelle édition, on avait envie de le faire dans une autre ville, avec l’idée de bouger un peu chaque année. On veut faire en sorte que, sociologiquement, les gens ouvrent leurs chakras et leurs esprits tout en passant un moment super joyeux. C’est ce qu’on a vécu l’année dernière à Lyon, c’était très puissant. C’est bien ce qu’on compte revivre cette année à Paris à la Citée Fertile.
Quelles seront les activités que vous proposerez pour cette nouvelle édition ?
On a une grosse programmation de conférences et d’ateliers autour de cinq thématiques qu’on a identifié : la notion de famille, la particularité de faire famille en tant que personne queer, de la vulgarisation des identités queer, et nos situations dans le système scolaire et péri-scolaire ainsi qu’en entreprise. On a entre 50 et 70 intervenants et témoignants sur les deux jours. Et à côté de ça on aura aussi un aspect beaucoup plus festif avec une tombola, des ateliers réservés aux enfants et adolescents, un show drag avec La Briochée et la Big Bertha, ou encore une soirée Queer Disco Glitter !
Quelles sont vos revendications pour les familles queer aujourd’hui ?
Ce sont des enjeux qu’on retrouve au quotidien. Il y a encore beaucoup d’obstacles au niveau de la PMA, pour les papas, pour les parentalités trans…. Pour nos familles, c’est aussi des coming-out à répétition, à faire et refaire, puisqu’il y a une présomption de l’hétérosexualité qui est massive. C’est encore très fréquent qu’en allant à l’école ,un enfant doive faire face au choix père/mère. Il y a tout un regard de la société qui doit changer avant de pouvoir modifier les éléments de droit. Avant on parlait de la femme au singulier avant de finir par parler des femmes. Il serait temps de faire pareil avec la famille, il faut parler des familles au pluriel. Qu’on se dise bien que le schéma papa-maman n’est plus le schéma de base. Ce n’est pas qu’un enjeu LGBT, ça concerne aussi les familles recomposées, les familles monoparentales…. On veut donner à voir la constellation de nos familles, parce qu’il y a une multitude de schémas familiaux. On compte travailler beaucoup sur ça, en utilisant notamment la datavisualisation pour montrer cette pluralité. On a aussi une fresque des futurs souhaitables, sur ce qu’on voudrait de la société de demain et du regard qu’elle porte sur les familles. À terme l’objectif est aussi d’atteindre des personnes queer qui ne sont pas encore en famille et qui le voudraient. Il y a dix ou vingt ans être queer c’était renoncer à la parentalité. Aujourd’hui on veut vraiment clarifier que c’est accessible et possible. On sait aussi qu’en entreprise, de nombreuses personnes ne sont pas out, ce qui veut aussi dire qu’un certain nombre de personnes dans leurs entreprises ne disent pas qu’ils et elles sont parents. Ce sont des éléments qui paraissent incroyables, imaginer qu’on peut encore aujourd’hui avoir des vies parallèles.
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