En salles cette semaine : « Un visa pour la liberté », d'Ayse Toprak
Comment l'organisation d'un concours de Master Gay Syria en dit long sur le parcours des exilés LGBT. Le documentaire poignant de la réalisatrice Ayse Toprak est à voir absolument.
Mahmoud, réfugié gay en Allemagne, a un rêve fou : organiser le concours de Mister Gay Syria, pour donner à voir la situation des gays syriens réfugiés et celle des personnes LGBT en général dans ce pays meurtri du Moyen-Orient.
Le documentaire poignant de la réalisatrice Ayse Toprak va suivre le parcours de Husein, 24 ans, gay et réfugié en Turquie. Il faut souligner le courage et la sincérité incroyable de Husein, qui accepte d’être filmé dans toutes les situations et se confie sans pudeur et sans filtre. Pour le jeune homme, ce concours est une opportunité pour sortir de sa condition. A travers son témoignage et sa vie, et ceux d’autres candidats au concours, on comprend mieux ce qui est en jeu dans leur pays d’origine : la dissimulation, la double vie, les risques pris quotidiennement. Husein est marié et a une petite fille et s’il a pu fuir la Syrie, personne dans son entourage ne sait qu’il est homo.
La grande force du film est de montrer aussi que rien n’est vraiment réglé par l’exil. Les scènes d’une manifestation LGBT réprimée par la police à Istanbul font revivre la peur dans les yeux de Husein. Un profond respect transparaît au fil du film : la caméra d’Ayse est toujours au plus près des protagonistes mais avec douceur et sans spectacularisme.
Mais rien ne va se passer comme prévu pour le jeune homme. Pour participer au concours, qui doit se tenir à Malte en 2016, il faut un visa… Au delà des beaux discours européens sur l’accueil des réfugiés LGBT, les difficultés rencontrées par Husein montrent au contraire l’absence réelle de volonté politique et des frontières de plus en plus hermétiques. A l’heure où un élan de solidarité – et tant mieux ! – se manifeste face à la guerre en Ukraine et à l’accueil des réfugié·es, la situation vécue par les protagonistes Un visa pour la liberté (Grand prix documentaire au Festival Chéries-chéris 2017) résonne encore plus douloureusement. A voir absolument.
« Un visa pour la liberté », de Ayse Toprak(1h28), le 11 mai au cinéma
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