Découvrez l'œuvre intense de la photographe et activiste sud-africaine Zanele Muholi
L'œuvre de la photographe et activiste Zanele Muholi est majeure puisqu'elle documente depuis le début des années 2000 les personnes LGBTI+ dans son pays d'origine, l'Afrique du Sud.
Lorsque nous avions rencontré Zanele Muholi en 2012, alors qu’elle était venue avec son équipe de femmes footballeuses sud-africaines à Paris, pour un match organisé par Foot For Love, elle nous avait fait forte impression. À la fois par son dynamisme et son énergie communicative, mais aussi par la force de son engagement dans un travail photographique de longue haleine.
Son œuvre est en effet majeure puisqu’elle photographie depuis le début des années 2000 les personnes LGBTI+ dans son pays d’origine, l’Afrique du Sud.
C’est dire toute l’importance du très beau livre publié par les éditions Bernard Chauveau et la Maison européenne de la photographie (MEP). Il présente les nombreuses séries réalisées au fil des années par la photographe et activiste, depuis Only Half the Picture, jusqu’aux autoportraits de Somnyama Ngonyama.
Dimension militante
Son travail dans sa dimension militante, Zanele Muholi le décrit par cette phrase : « Je réécris une histoire visuelle de l’Afrique du Sud queer et trans afin que le monde entier sache que nous existons, que nous résistons et que nous persistons. »
Dans Only Half the Picture, sa première série, elle montre des fragments de corps (sans visage), ceux de femmes victimes de crime de haine homophobe. Dans Faces and Phases, qu’elle a commencé en 2006, et qui est très impressionnante, elle utilise la technique classique du portrait pour montrer des femmes lesbiennes noires et des personnes queer. Comme elle l’a écrit, « Faces and Phases est un point de vue d’initiée qui à la fois commémore et célèbre la vie des queers noirs que j’ai rencontrés au cours de mes voyages. Certaines de leurs histoires m’ont donné des nuits blanches alors que j’essayais de traiter les luttes qui m’étaient racontées. »
Zanele Muholi fait partie de cette « famille nombreuse » de photographes militants en Afrique du Sud, comme David Goldblatt, Santu Mofokeng, Cedric Nunn, Omar Badsha. Par son travail, elle interpelle sur la visibilité dans l’art des personnes des groupes marginalisés : les Noir·es, les femmes et les personnes LGBTQI+.
La MEP, à Paris, devait accueillir une grande exposition rétrospective consacrée à cet artiste aujourd’hui pleinement reconnue, mais l’épidémie de Covid en a décidé autrement. L’exposition est décalée à début 2023. Raison de plus pour s’offrir (ou se faire offrir) ce très bel ouvrage, qui comprend aussi une interview de l’artiste ainsi qu’une chronologie bienvenue de l’histoire sud-africaine. La couverture (sans titre), sur laquelle Zanele Muholi, nous fixe intensément, résume magnifiquement le propos bouleversant de ce livre et le travail passionnant de cette artiste engagée.
« Zanele Muholi », sous la direction de Sarah Allen et Yasufumi Nakamori, éditions Bernard Chauveau avec la MEP, 192 p., 37€.
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sofiane-h
Merci pour cette belle découverte.