Marie Labory : « À la télé, je suis toujours la seule lesbienne out… depuis plus de 15 ans ! »
La seule femme lesbienne out de la télé française s’étonne que son statut singulier dans le PAF, que sa PMA en Espagne dont elle parle ouvertement, n’intéressent pas plus les médias. Pour Komitid, elle revient longuement sur son parcours.
Journaliste télé depuis la fin des années 90, Marie Labory a toujours assumé son homosexualité. Elle se fait connaître du grand public pendant les deux années (2004-2006) que dureront Le Set sur Pink TV, qui reste à ce jour la seule tentative d’émission quotidienne LGBT+ sur les ondes françaises.
Depuis 2008, elle présente en alternance le journal télévisé d’Arte reconnu pour son sérieux et sa qualité sans faire de vagues. La seule lesbienne out de la télé française s’étonne que son statut singulier dans le PAF, que sa PMA en Espagne dont elle parle ouvertement, n’intéressent pas plus les médias.
Pour Komitid, elle revient sur son parcours et s’interroge sur les progrès éventuels de la perception des LGBT+ dans le monde des médias.
Komitid : Enfant, est-ce que vous vous rêviez journaliste ?
Marie Labory : Les gens me disent que j'ai toujours voulu faire ça mais je ne m'en souviens pas. C'est vrai que, gamine, j'ai toujours fait des journaux, des films, de la radio et que j'avais organisé un journal au collège. Donc, je pense quand même que j'avais le truc. J'avais surtout envie d'écrire et de faire quelque chose qui soit un peu amusant. Je viens de la vraie province, du Sud-Ouest, j’ai grandi dans un tout petit bled puis dans une ville à peine un peu plus grande et on n’était pas très informé de ce qu'on pouvait faire à part avocate ou médecin. Journaliste paraissait le truc le plus marrant, le plus fun. Après le bac, je crois que ma mère rêvait que je fasse Sciences-Po et moi je ne voulais surtout pas, je savais qu'il fallait que je règle quelque chose avant : être lesbienne ! Je n'avais pas envie de bachoter, je suis rentré à ce qui s'appelait encore à l'époque l'IUT de journalisme de Bordeaux qui s'appelle maintenant l’IJBA. Ensuite, j'ai fait le parcours classique des stages à France 3 puis des CDD avant d'être intégré à France 3 Caen. J'avais 24 ans et j'étais la seule fille dans la rédaction, ils avaient tous plus de 20 ans de plus que moi. Vers 1998, j’ai rejoint Francis Letellier qui présente aujourd’hui Soir 3, à Rennes. Un moment j'en ai eu ras-le-bol, je ne me voyais pas devenir chef à France 3 Régions. J'ai pris un congé sans solde pour retourner à Bordeaux où j'ai vécu en coloc avec mon frère, c'était super. Là, mon autre coloc m'a parlé d'une chaîne qui allait se créer : Pink TV. J'ai envoyé un autoportrait que j'avais filmé et j'ai été prise après le casting.
« J’ai été out très très vite dans les rédactions de France 3 dans lesquelles je travaillais »
Le fait d'être embauchée sur Pink TV, cela impliquait-il une visibilité nouvelle ?
Je me suis d’abord dit que j'allais m'amuser, je n'étais peut-être pas encore très adulte ! J’ai été out très très vite dans les rédactions dans lesquelles je travaillais et cela n'avait pas d'écho puisque personne n'en parlait à France 3 Normandie ou à France 3 Ouest. Cela faisait partie de mon identité et je l'assumais déjà au travail. À Caen, je crois que j'avais fait le premier sujet sur le pacs en France, c'était déjà militant. Arriver sur Pink TV, cela m'a paru assez évident, je ne me suis pas posé tellement de questions et en plus je devais parler de culture, quelque chose dont je rêvais depuis longtemps. C'est arrivé à point nommé.
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