Succès de plusieurs marches des fiertés, à Lyon, la « non-mixité » fait débat
En tête de la Marche des Fiertés, samedi 12 juin à Lyon, un emplacement était réservé aux « queer racisé·es ». D'autres marches ont eu lieu avec succès : 7 500 personnes à Nantes, 7 000 à Strasbourg et 5 000 à Lille dimanche.
« C’est la première fois qu’on est sur le devant de la scène » : en tête de la Marche des Fiertés, samedi 12 juin à Lyon, un emplacement est réservé aux queer racisé·es. Samuel, 23 ans, dreadlocks et mini-jupe rose, se félicite que leur lutte ignorée apparaisse enfin en pleine lumière.« Black queer lives matter ! », lance Samuel, en référence au mouvement né aux États-Unis, Black Lives Matter. « C’est aussi pour notre communauté, leur montrer qu’on est là ».
« On est à l’intersection de plusieurs discriminations et on est souvent les oubliés », abonde Diakleb, jeune homme mince de 21 ans aux cheveux crépus teints en blond.
« On est à l’intersection de plusieurs discriminations et on est souvent les oubliés »
La 25e Marche des Fiertés à Lyon — qui a réuni 12.000 personnes samedi après-midi selon la préfecture, 30 000 selon les organisateurs — a mis en place une organisation inédite, et critiquée, basée sur des cortèges « en non-mixité » : le cortège « queer racisé-e-s » en tête, qui a rassemblé une vingtaine de personnes, est suivi des personnes en situation de handicaps, des personnes lesbiennes, des personnes trans, non-binaires et intersexes.
Sur le char qui transporte une quinzaine de personnes en situation de handicap, Nuage, 21 ans, a accroché une pancarte « On existe » à une roue de son fauteuil. « La non-mixité, c’est une très bonne idée pour nous donner de la visibilité et ici je me sens en sécurité donc plus à l’aise », estime la jeune « trans et handi », considérant que « ceux qui critiquent sont ceux qui en ont le moins besoin ».
Suivent, plus nombreuses, les manifestantes lesbiennes qui donnent de la voix notamment pour réclamer la « PMA pour toutes ». « PMA, on lâchera pas », scandent les jeunes femmes.
Pour fermer la marche, le cortège mixte, « ouvert à tout le monde », a regroupé l’immense majorité des manifestant·es.
En mai à Tours, la polémique sur la zone « non-mixte pour les personnes LGBT+ racisées » de la Marche des Fiertés avait contraint les organisateurs à annuler la manifestation.
Aucune « volonté d’exclusion »
« Je suis racisée et trans. Donc, quand on est concerné par plusieurs paramètres, on ne sait pas trop où se mettre et il manque plein de catégories comme les bi·es », regrette une femme trans de 21 ans, aux longs cheveux de jais, déplorant aussi que cette catégorisation ait pu « empêcher des personnes de venir ».
À ses côtés, Noé, 25 ans, casquette vissée sur la tête, dit comprendre que « certains (aient) besoin de créer ces espaces ». « Mais ce n’est pas le choix que j’aurais fait ».
Un manifestant surnommé « Kiki », chevauchant une licorne en peluche, veut « rester dans la mixité ». « On est bien dans le LGBT+. C’est la Marche des Fiertés avant tout ; ça reste dans la démarche collective », juge ce cadre dans le marketing de 33 ans.
La non-mixité s’inscrit dans « une volonté de repolitiser la manifestation et de permettre à une partie de la communauté qui peut se sentir invisibilisée de donner plus de portée à leurs problématiques mais sans volonté d’exclusion. Tout le monde est bienvenu », fait valoir à l’AFP Hugo, un porte parole du Collectif Fiertés en lutte (CFL), organisatrice de la marche. « On a beaucoup réexpliqué la non-mixité car c’est nouveau en France mais c’est un outil militant », poursuit le responsable.
Sur les réseaux sociaux, où ce choix a divisé, le CFL a expliqué que « les cortèges non-mixtes ne sont pas forcément des espaces clos dans lesquels nous forçons toutes les personnes appartenant à la minorité concernées à se rendre ». « Chacun·e est libre de choisir si iel souhaite marcher en mixité ou non », a ajouté le collectif qui demandait toutefois aux participant·es de « respecter les cortèges en non-mixité ».
Ce week-end de Marche des Fiertés a été un succès dans plusieurs villes samedi avec 7 500 personnes à Nantes, 7 000 à Strasbourg et dimanche, 5 000 à Lille.
Avec l’AFP
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