Les Golden Globes lâchés par leur diffuseur NBC pour manque de diversité et transparence
Les Golden Globes sont-ils menacés de disparition? La chaîne américaine NBC a annoncé lundi 10 mai qu'elle ne diffuserait pas l'an prochain la cérémonie de remise de ces prestigieuses récompenses, dont les organisateur·trices ont été vivement critiqué·es par les studios et stars d'Hollywood pour leur bilan en matière de diversité et de transparence.
L’Association de la presse étrangère d’Hollywood (HFPA en anglais), un groupe d’environ 90 journalistes qui constituent le jury des Golden Globes, a annoncé la semaine dernière qu’elle avait adopté une série de réformes pour améliorer sa représentativité et tenter d’apaiser la polémique alimentée depuis des mois par des accusations de discrimination, de sexisme voire de corruption à l’encontre de certains membres.
Mais ces assurances n’ont pas convaincu l’industrie du divertissement et les reproches ont continué à pleuvoir tout le week-end, jusqu’à la décision fatidique du diffuseur NBC. « Nous continuons à croire que la HFPA est déterminée à se réformer de manière significative. Cependant, un changement d’une telle ampleur demande du temps et du travail et nous avons la nette impression que la HFPA a besoin de temps pour faire cela correctement », a expliqué la chaîne dans un communiqué lundi.
« Par conséquent, NBC ne diffusera pas l’édition 2022 des Golden Globes », ajoute-t-elle, soulignant avoir « bon espoir de diffuser le spectacle en janvier 2023 » si les organisateurs mettent en oeuvre leur programme de réformes.
L’annonce est un coup dur pour les Golden Globes, dont le financement dépend beaucoup des droits de retransmission de la cérémonie, et certain·es observateur·trices de l’industrie du divertissement craignent qu’ils ne puissent pas s’en relever.
La plupart des membres de la HFPA sont des correspondant·es travaillant régulièrement pour des médias connus et respectés dans leur pays, comme le Figaro ou El País. Mais la réputation de ce très inhabituel jury a pâti par le passé de la présence d’une poignée de personnalités plus surprenantes, à l’activité journalistique épisodique et confidentielle.
Surtout, l’organisation a été à de multiples reprises critiquée pour le peu d’attention accordée aux artistes racisé·es ou issu·es de minorités, souvent snobé·es dans les palmarès des Golden Globes.
« Questions sexistes et racistes »
Jeudi, les membres de l’association ont majoritairement approuvé une série de mesures, parmi lesquelles une augmentation de leur effectif de 50 % dans les 18 prochains mois, avec notamment le recrutement de journalistes racisé·es, ainsi que la réforme du système opaque et restrictif régissant les admissions.
« Le vote très majoritaire pour réformer l’Association réaffirme aujourd’hui notre détermination au changement », avait déclaré le président de la HFPA, Ali Sar. « Parce que nous comprenons l’urgence et l’enjeu de la transparence, nous mettrons continuellement à jour nos membres au fur et à mesure que nous progresserons pour rendre notre organisation plus inclusive et plus diverse », écrit-il.
Cela n’a toutefois pas suffi à convaincre Hollywood. Netflix et Amazon Studios ont tous deux affirmé ne plus souhaiter travailler avec la HFPA tant que des changements « significatifs » n’auraient pas été accomplis tandis que les studios Warner Bros ont écrit lundi à Ali Sar pour se plaindre que le programme de réformes de la HFPA n’allait « pas assez loin ».
Jusqu’à nouvel ordre, les filiales cinéma et télévision de Warner vont « s’abstenir de toute interaction directe » avec l’organisation, y compris concernant la participation de vedettes à des événements organisés par la HFPA.
« Nous n’avons que trop conscience de l’énergie que nous avons dû déployer afin d’obtenir des conférences de presse pour un certains nombre d’interprètes et de créateurs noirs qui portaient indéniablement des oeuvres de valeur », déplore cette lettre, citée par le site spécialisé Deadline. « Ces mêmes oeuvres sont souvent passées ensuite inaperçues dans vos nominations et récompenses ».
En outre, Warner Bros pointe du doigt des « conférences de presse où nos artistes ont été confrontés à des questions racistes, sexistes et homophobes. Depuis bien trop longtemps, des demandes d’avantages, de faveurs spéciales et des demandes non professionnelles ont été adressées à nos équipes et à d’autres personnes » du secteur.
Ces déclarations font écho à celles tenues par Scarlett Johansson, qui a expliqué ce week-end refuser de prendre part depuis des années à des conférences de presse de la HFPA en raison de « questions et remarques sexistes » qui « frisent le harcèlement sexuel » selon l’actrice.
Son collègue Mark Ruffalo a quant à lui déclaré récemment qu’il ne pouvait se sentir « fier ou heureux » du Golden Globe obtenu en février dernier pour la série I Know This Much Is True de la part d’une organisation ayant « une culture du secret et de l’exclusion ».
Avec l’AFP
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