Le Prix du roman gay 2019 est attribué à… Philippe Joanny pour son roman « Comment tout a commencé »
Philippe Joanny, Abdellah Taïa, Raphaël Thomas et bien d'autres figurent au palmarès de la 7ème édition de ce prix littéraire qui revendique son côté communautaire… et gay.
Le Centre LGBT de Paris – Ile-de-France était bondé le 9 novembre dernier pour accueillir la cérémonie de remise du Prix du roman gay 2019, septième édition du genre. Ce prix récompense « des ouvrages de langue française originale, qui appartiennent à une littérature d’inspiration homosexuelle masculine », explique Gérard Goyet, des Éditions du Frigo, son fondateur. « Le Prix du Roman Gay ne se veut absolument pas ghettoïsant » tient-il à préciser. « La notoriété, le genre et l’orientation sexuelle des auteur.e.s ne rentrent évidemment pas en ligne de compte, il s’agit de distinguer des écrivains avant tout. »
Les grandes maisons d’édition participent au Prix du roman gay, mais aussi des auteur.e.s auto-édité.e.s, en partenariat avec des éditeurs/imprimeurs ou des petits éditeurs indépendants, voire alternatifs. « Ce concours est avant tout une initiative visant à favoriser la visibilité, de même qu’une coexistence solidaire, multiple et connectée, une manière de lutter contre l’homophobie », précise encore Gérard Goyet.
Cette année, le jury, composé d’auteur.e.s, critiques, blogueurs, blogueuses, lectrices, lecteurs, libraires et éditrices-eurs… LGBT ou non, originaires de France, Belgique, Suisse et Canada a eu fort à faire pour départager les 80 titres issus d’une première sélection. À l’issue des délibérations, une vingtaine de récompenses ont été attribuées.
And the winner is…
Le Prix du Roman Gay 2019 a été attribué à Philippe Joanny pour son roman Comment tout à commencé, paru chez Grasset. L’heureux récipiendaire était évidemment très heureux. « Ce prix est une distinction importante à mes yeux » a-t-il confié à Komitid. « D’abord, il redonne de la visibilité au livre, ce qui est une chance, il peut toucher encore plus de lecteurs et de lectrices et c’est formidable. Ensuite et surtout, ce prix est le signe que la communauté soutient le livre. Comment tout a commencé raconte, dans le Paris des années 1980 en pleine mutation, l’histoire d’un gamin dont l’éveil au désir coïncide avec l’arrivée du sida. Et cette histoire, c’est bien sûr la mienne, mais pas seulement. C’est aussi une partie de notre histoire commune. Et c’est pour cela que je suis fier de voir le livre recevoir aujourd’hui cette récompense. »
Coup de cœur du jury
Le jury a aussi distingué J’aime le sexe, mais je préfère la pizza, de Thomas Raphaël (Flammarion), qui s’est vu attribuer un coup de cœur. « Quand on m’a dit que j’avais le prix du roman gay », a raconté Thomas Raphaël à Komitid « vu qu’en tant qu’auteur je fais corps avec mon livre – d’autant que c’est une autobiographie -, ce que j’ai entendu c’est que j’avais été élu meilleur homosexuel de l’année. Donc, ça m’a fait plaisir. Forcément. Après, on m’a dit que je n’étais pas le “meilleur”, mais le “coup de cœur”. Dans tous les cas, je suis sur le podium de l’homosexualité. Ce n’est pas rien. »
« J’ai eu peur du côté “tampon gay sur le front”. J’en ai parlé à mes amis. Ils m’ont répondu : “Ah bon, mais ça parle de trucs gay, ton livre ? Fallait le dire, on l’aurait lu, du coup”. Preuve que ça a aussi des avantages, les tampons. »
« On a besoin de représentation dans les romans, dans l’art, partout. Et à ceux qui disent qu’on n’en est plus là, qu’on est intégrés, il faut leur répondre, d’une part, que ce n’est pas vrai et qu’on se fait encore frapper dans le Marais et aux Buttes Chaumont. Et quand bien même. Au bout de 2 500 ans de littérature, les hétéros ne se se sont pas dit que, ça y est, c’était bon, ils pouvaient s’arrêter. Non, ils continuent d’écrire des livres, des films et des chansons sur comment on tombe amoureux. »
« Et nous aussi, on a besoin de continuer. On aura toujours besoin de continuer. On a besoin de se sentir représenter pour se sentir exister. Lire les Chroniques de San Francisco, à 18 ans, ça a changé ma vie. Littéralement. C’est grâce à Armistead Maupin que j’ai réalisé que j’avais le droit d’essayer d’être heureux. Avec ce prix, je suis content d’apporter ma petite contribution. »
Mention spéciale du jury
Le jury a également tenu à décerner une mention spéciale à Abdellah Taïa pour son ouvrage La Vie lente, aux éditions du Seuil. « Je dédie cette distinction à tou-te-s mes lecteurs/lectrices dans notre communauté LGBTQ+ en France, au Maroc et ailleurs. J’écris pour dire les voix de ceux-celles qu’on n’entend pas. Et, jusqu’au bout, je continuerai de le faire », s’est réjoui Abdellah Taïa.
- Lire aussi : Abdellah Taïa : « Je suis extrêmement attendri par Bilal Hassani et j’aimerais beaucoup le rencontrer. L’interviewer. Écrire sur lui »
Prix d’honneur
Jean-Paul Tapie a été distingué pour l’ensemble de son oeuvre, publiée par les Éditions H&O et les Édition Textes Gais
Les autres récompenses
PRIX DU ROMAN COURT – Prix du roman gay 2019 :
- Le Héros et les autres de Antonin Crenn aux Editions Lunatique
- Planètes de Mario Cyr, chez Annika Parance Editeur
PRIX DECOUVERTE – Prix du roman gay 2019 :
- Le ventre de mes yeux de Anthony McFly aux Editions Amazon Fulfillment
- Sobek, confession d’un meurtrier de Michto Rex aux Editions Atramenta
- Le salon marocain de Djalil Djezzar aux Editions Textes Gais
PRIX DU PREMIER ROMAN – Prix du roman gay 2019 :
- Le syndrome de Mendelssohn de Pascal Estève aux Editions Independently Published
- Retrouver Gabrielle de Jean-Benoît Dumonteix aux Editions Fauves
PRIX DU ROMAN HISTORIQUE – Prix du roman gay 2019 : La Vénus d’albâtre de Pierre Forni aux Editions Tautem
PRIX DU RECUEIL DE NOUVELLES – Prix du roman gay 2019 :
- Confidences d’un H. de Bakry Diarra aux Editions Ozecla
- Les cendres muettes de Guy Torrens aux Editions Edilivre
PRIX DE LA ROMANCE GAY – Prix du roman gay 2019 :
- D’autres horizons de Tan Hagmann et Angie Le Gac aux Editions d’Autres Horizons
- En aller simple de Cédric Hermann aux Editions Coeur de Lune
PRIX DU ROMAN POLICIER – Prix du roman gay 2019 :
- Le cercueil farci de Dieter Moitzi aux Editions CIPP
- Les invertis de Annabel aux Editions Ex Aequo
PRIX DU RECUEIL DE NOUVELLES EROTIQUES – Prix du roman gay 2019 :
Chaud devant de Tom Blade aux Editions H&O
Entre hommes de Frank du Japon aux Editions Veuve Poignet
PRIX DE LA BIOGRAPHIE – Prix du roman gay 2019 : Montgomery Clift, L’enfer du décor de Sébastien Monod aux Editions Lettmotif
PRIX DU RECIT AUTOBIOGRAPHIQUE – Prix du roman gay 2019 : ZAM de Martino Ebale aux Editions M.E.O.
PRIX DU RECUEIL DE POESIE – Prix du roman gay 2019 : Délices et Infamie de Michel Bellin aux Editions CHAPITRE.COM
PRIX DE L’ESSAI – Prix du roman gay 2019 : Les dires des nuages qui pleurent ou l’histoire de Tayyib et Tahir de Nev’î-zâde Atâyî et Laurent Baudoin aux Editions Unicite
PRIX DE LA SAGA GAY – Prix du roman gay 2019 : Sangs-mêlés de Jean-Philippe Fresnoy aux Editions Publibook
PRIX DE LA MAISON D’EDITION – Prix du roman gay 2019 : attribué aux Editions GAY KITSCH CAMP
Pour terminer sur une note légère, le jury s’est autorisé un clin d’œil en attribuant le PRIX DU PRIX LITTERAIRE – Prix du roman gay 2019 au Prix Goncourt qui a été remis à Marcel Proust il y a cent ans pour À l’ombre des jeunes filles en fleurs. Cette touche humoristique était surtout l’occasion de saluer la publication de Le Mystérieux correspondant et autres nouvelles inédites de Marcel Proust aux Éditions de Fallois.
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