« Déjà vu » : Un couple gay, trois époques, dans une pièce sur les luttes pour l’égalité
Une pièce légère et politique, parfois naïve mais toujours sincère, à découvrir avant la fin du mois d’octobre à Paris.
Déjà vu, c’est trois garçons, une fille, trois époques pour raconter à travers une pièce de théâtre l’histoire récente des luttes pour l’égalité des droits entre gays et hétéros. Une pièce légère et politique, parfois naïve mais toujours sincère, à découvrir avant la fin du mois d’octobre à Paris.
Canevas contemporain
Création originale encore visible pour quelques représentations au Théâtre Clavel dans le 19ème arrondissement de Paris, Déjà vu met en scène un couple de garçons, Franck et Mickaël, leur meilleure pote pas vraiment lesbienne, Julie, et leur ami « haut en couleur » Gaby (« Pas Gabriel, c’est trop vulgaire »). Sur ce canevas contemporain qui suit Franck dans son récit de vie, son arrivée de province à Paris, l’acceptation de son homosexualité au contact d’une asso LGBT, jusqu’au mariage qui ouvre la pièce, va se greffer une structure gigogne, permettant par des artifices créatifs (un roman, une pièce) ou des marqueurs historiques (le combat pour le mariage pour tous, le pacs, la dépénalisation de l’homosexualité) d’envisager près de 40 ans de luttes pour les droits des gays et la normalisation des couples de même sexe.
Franck, Mickaël, Julie et Gaby vont se réincarner selon les époques et les problématiques avec lesquelles la pièce joue.
Flashbacks
La mise en scène s’amuse des flashbacks, des changements d’époque et de décors et met à profit des gimmicks musicaux (les chansons de Grease) ou de vrais moments d’émotions quand, notamment, Gaby (ou plutôt l’un de ses doubles travesti) reprend le Pour ne pas vivre seul de Dalida.
Étonnante dextérité
Les trois comédiens et la comédienne, formidables, débordent d’une énergie communicative et alternent les époques et les personnages avec une étonnante dextérité.
Bien sûr on n’évite pas quelques clichés ou maladresses (notamment les quelques références au sida plutôt assez mal amenées) mais ce qui pourrait être pris pour un excès de naïveté vient avant tout d’une façon de concevoir la pièce sur un mode café-théâtre qui fait la part belle à la connivence et à la complicité avec un public varié en termes d’âges et de sexualités.
De tous les thèmes qu’abordent Déjà vu et son fonctionnement kaléïdoscopique et multi-temporel, on retiendra également la force des phrases anti-mariage pour tous, scandées par les comédiens et la comédienne lors d’une scène de répétition théâtrale et les utilisations d’extraits des discours à l’Assemblée Nationale de Roselyne Bachelot à l’époque du pacs et de Christiane Taubira (appelée ici affectueusement « la grande Christiane ») pour le vote de la loi ouvrant le mariage à toutes et tous, des extraits désormais cultes qu’on a plaisir à voir intégrés au récit.
La pièce fonctionne sur un ciment impossible à remettre en question : la sincérité.
Revendiquer une certaine forme de légèreté, un divertissement protéiforme et une belle énergie pour aborder ces sujets politiques tout comme les questionnements plus quotidiens sur le désir d’enfant, les choix de vie, de carrière, le jeu des apparences, les relations amicales ou de couple, c’est une bonne idée et la pièce fonctionne sur un ciment impossible à remettre en question : la sincérité.
« Déjà vu », une pièce écrite et mise en scène par Renaud Fulconis avec Jonathan Darona, Romain Gimenez, Julien Orain et Caroline Riche.
Les jeudis 17 et 24 octobre à 21h30 au Théâtre Clavel, 3, rue Clavel, Paris 19ème
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