Un an après les révélations sur la "purge homosexuelle", n'oublions pas la Tchétchénie
Le quotidien indépendant Novaya Gazeta a révélé l'existence d'une répression ultra violente des homosexuels en Tchétchénie il y a un an jour pour jour. Et l'enquête est au point mort.
C’était il y a un an : le 5 avril 2017, le quotidien indépendant russe Novaya Gazeta révélait dans une enquête glaçante l’existence en Tchétchénie d’une « purge homosexuelle », menée par le pouvoir du président Ramzan Kadyrov. « On les emmène dans ces prisons pour les torturer, pour les humilier, pour les violer, pour les forcer à dénoncer d’autres homosexuels », s’était indigné à l’époque Guillaume Mélanie, co-fondateur d’Urgence Homophobie.
« Camps de concentration », incitations aux familles à « laver leur honneur » par le sang… les expressions utilisées pour décrire la situation sur place rappelaient les heures les plus noires de l’histoire européenne. Les témoignages des survivants ont pétrifié le monde alors que le Président tchétchène niait les révélations d’un revers de main, « nous n’avons pas ce genre de personnes chez nous. Nous n’avons aucun gay ».
D’Amnesty International à la comédienne Camille Cottin, la communauté internationale s’était rapidement emparée de la question. Des milliers de personnes ont pris des selfies de baisers, agrémentés du #Kiss4LGBTQrights en géolocalisant le Krémlin. En France, grâce entre autres à l’association Urgence Tchétchénie (devenue entre temps Urgence Homophobie), montée du jour au lendemain par un jeune comédien et des militantes russes, un concert avait été organisé afin de lever des fonds pour les survivants.
Alors que les gouvernements américains et européens demandaient à la Russie de lancer une enquête sur ces crimes perpétrés au sein de sa fédération, des personnes étaient extradées en urgence. En France, le premier réfugié, âgé de 26 ans, a été accueilli le 29 mai 2017, via un « visa humanitaire d’urgence ». Le même jour, Poutine effectuait une visite d’État à Versailles. Emmanuel Macron lui indiquait alors qu’il resterait « constamment vigilant » sur le sujet des droits humains, en Russie et en Tchétchénie. Le président-oligarque lui promettait que toute la vérité serait faite, après enquête.
Surprise
Malheureusement, – et ce n’est pas une surprise – aucune enquête n’a encore eu lieu un an après. De nombreuses personnes sont encore portées disparues. « Il y a un an, le gouvernement russe a tourné en dérision et balayé d’un revers de main ces informations choquantes émanant de Tchétchénie. Depuis, nous avons assisté à un déploiement de déni, de dérobade et d’inaction de la part des autorités, qui ont à maintes reprises refusé de diligenter une enquête officielle sur les crimes odieux signalés et ont ignoré les éléments crédibles dévoilés entre autres par Novaya Gazeta », a déclaré Denis Krivosheev, directeur adjoint pour l’Europe de l’Est et l’Asie centrale à Amnesty International.
Sur le terrain, l’ONG Réseau LGBT russe continue de se battre. Elle a permis de mettre en sécurité 116 personnes. 98 ont quitté la Russie. Pour les aider c’est ici.