Et si la star du « Secret de Brokeback Mountain » avait été Matt Damon ?

Qu’ils étaient beaux ces tristes cow-boys, s’étreignant dans la verdure du Wyoming, s’embrassant farouchement dans une odeur de cuir. Lorsque le réalisateur Ang Lee sort son film Le secret de Brokeback Mountain en 2005 aux États-Unis, il offre une visibilité rare aux personnes LGBT+. Surtout, il permet aux personnes hétérosexuelles d’appréhender l’homophobie subie et intégrée, au travers d’une histoire d’amour réaliste (ce qui était également la force du film de Kimberly Peirce Boys don’t cry, sorti en 1999). Si le film a été si légendaire, c’est aussi grâce à l’alchimie particulière qu’ont partagé à l’écran le regretté Heath Ledger et Jake Gyllenhaal. Pourtant, ce duo aurait pu être tout autre !

Lors d’une projection du grand classique Philadelphia et du Secret de Brokeback Mountain, à Santa Monica, l’oscarisée scénariste Diana Ossana est revenue sur les 10 ans de préparation du film, qu’elle avait écrit avec Larry McMurtry. Et sur le casting ! Selon elle, Daniel Day Lewis, Matt Damon, Mark Wahlberg et Joaquin Phoenix étaient dans les rangs pour jouer les vachers énamourés. « Pour la réalisation, on l’a envoyé à Edward Norton et Joel Schumacher et une douzaine de personnes et même s’ils ont dit qu’ils l’adoraient, personne ne voulait s’engager. Ils ne nous ont pas dit pourquoi. Je pense qu’ils trouvaient cela trop difficile », a-t-elle expliqué aux spectateurs et spectatrices.

La scénariste a aussi expliqué qu’il avait été particulièrement ardu d’obtenir le soutien de producteurs ou productrices exécutif.ve.s. Il fallait qu’ils comprennent en effet qu’il ne s’agissait pas de faire «  une histoire d’amour universelle »,  un argument pourtant beaucoup utilisé par la presse à la sortie du blockbuster. « C’est un film sur deux hommes qui tombent amoureux. C’est très spécifique. Cela concerne Ennis et Jack, sur leurs faiblesses et leurs erreurs et leurs difficultés, et leur humanité ». 

La scénariste a aussi raconté que si Heath Ledger a accepté le rôle, c’est aussi parce que Naomi Watts l’y a poussé. L’actrice considérait que c’était une très bonne opportunité pour sa carrière, et pour le monde ! À l’occasion des 10 ans du film, le spécialiste de l’histoire du cinéma LGBT Didier Roth-Bettoni avait expliqué à Yagg combien le film avait fait date dans la représentation des amours non hétérosexuelles. « C’était effectivement surprenant, il n’y avait pas eu d’équivalent précédemment. J’ai tendance à comparer ce film et ses conséquences, la façon dont il a été perçu à ce que Philadelphia a pu être treize ans plus tôt par rapport à la question du sida. Une mise à nu sous les yeux du public d’une réalité qu’il ne voulait ou qu’il ne pouvait pas voir, à laquelle il n’avait pas accès. »

Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts et La Vie d’Adèle ou 120 battements par minute ont continué à creuser la piste.