Demandeurs et demandeuses d'asile LGBT+ au Royaume-Uni, l'heure est grave
Après qu'une demandeuse d'asile ait filmé une agression lesbophobe dans un centre d'hébergement privé, le Royaume-Uni fait face à une grave urgence dans sa politique d'accueil.
La situation est devenue intenable pour les centaines de personnes LGBT+ qui chaque année quittent le Bangladesh, le Pakistan, la Syrie ou l’Irak pour se réfugier de l’autre côté de la Manche. En Angleterre, les demandeurs et demandeuses d’asile sont hébergé.e.s dans des centres d’accueil parfois publics, souvent privés. C’est la gestion de ces derniers que vise une enquête récente du quotidien The Guardian, et qui va remonter aux oreilles du gouvernement de Theresa May. Il était temps.
Fuir des persécutions… Pour en subir de nouvelles ?
Insultes, agressions physiques, viols, certain.e.s réfugié.e.s considèrent que la situation vécue dans les centres est similaire aux persécutions qu’ils et elles ont vécues dans leurs pays d’origine. Face à une impasse, certain.e.s doivent même choisir entre vivre avec la peur, ou vivre dans la rue, raconte le quotidien.
Pire, les plaintes adressées à la direction des centres restent souvent lettre morte. Kate Hendickson, une femme originaire de Trinité et Tobago, avait filmé l’agression qu’elle avait subie avec son téléphone portable. L’un de ses colocataires de fortune s’était exposé devant elle et lui avait adressé des insultes lesbophobes. Après avoir montré la vidéo au tenancier de son centre, opéré par l’entreprise G4S, elle s’était vue refuser un replacement. « Nous sommes censé.e.s être protégé.e.s. Le suis-je ? Non » a-t-elle dit « Il est indiqué qu’il ne devrait pas y avoir de racisme, ni de sexisme [dans ces centres], je subis cela, je demande de l’aide et n’en reçois aucune. Je me dis qu’en fait, ils attendent juste un drame sanglant » a-t-elle raconté au grand quotidien britannique.
Face aux questions des journalistes, l’office a bien été obligé de reloger cette femme, et de s’expliquer par la voix d’un porte-parole : « nous prenons les plaintes très sérieusement et disposons de procédures très rigoureuses pour inspecter, enquêter et résoudre ces faits quand ils nous arrivent, et quand des informations spécifiques nous sont données. »
Une situation qui ne date pas d’hier
Les demandeurs et demandeuses d’asile LGBT+ subissent depuis longtemps les conséquences de la politique migratoire anglaise. Le statut de réfugié.e doit en théorie être apporté aux personnes qui subissent dans leur pays d’origine des menaces de morts dues à leurs orientations sexuelles ou leurs identités de genre. Mais c’est loin d’être le cas.
En 2016, le magazine Pink News a rempli une demande de droit à l’information auprès du Ministère de l’Intérieur anglais, pour accéder aux données sur les premières demandes des personnes LGBT+. Une demande qui aurait du recevoir une réponse sous 20 jours, mais qui vient seulement d’être acceptée, en janvier 2018.
Les chiffre sont éloquents. Entre juillet 2015 et mars 2017, 3535 personnes ont rempli une demande d’asile avec le motif de l’orientation sexuelle (6 % des demandes). Les deux tiers ont été rejetés : 84 personnes ont été renvoyées en Iran, 268 au Nigeria, deux pays où l’homosexualité est condamnée à mort.
L’enquête du Guardian, et le tollé qu’elle provoque, donnera peut-être à réfléchir à Theresa May, qui répondait l’année dernière à Pink News : « sur la scène mondiale, nous soutenons les droits LGBT et nous confrontons aux plus hauts niveaux de responsabilités, les gouvernements du Monde qui autorisent ou infligent discriminations et abus. »
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